Roman chapitre IV

Chapitre IV

Ils seraient sans doute restés encore plusieurs jours sur ce petit paradis, un peu comme un nid perdu entre la mer et le ciel, mais des contingences matérielles se rappelèrent au bout de quelques jours : les provisions étaient presque terminées et les deux smartphone, aphones ! Et puis, il y avait encore beaucoup à découvrir comme l’indiquait le guide que Laetitia avait emprunté à la bibliothèque avant de partir. Au contrat était prévu «  visite de musées », pour le moment la case était vide. Elle opta pour un monastère, un peu perdu dans les montagnes. La route était assez vertigineuse, accrochée à la montagne, peu de végétation et une vue qui regardait au loin s’éloigner la côte où la mer scintillait encore par éclat. Après un col très venteux, ils arrivèrent au sanctuaire et là ils furent très étonnés de trouver un énorme parking plein de voitures et de bus et une foule nombreuse qui se dirigeait vers l’église. Les gens étaient tous très endimanchés et  leurs baskets et leur short détonaient un peu. Entrés dans l’édifice, ils comprirent qu’ils se trouvaient au beau milieu d’un mariage ! Évidemment un samedi de juillet, dans ce lieu qui manifestement était très à la mode, vers quatre heure de l’après-midi…c’était un mariage. Alors ils s’assirent discrètement au fond car ils voulaient en profiter pour voir la nef dont les sculptures et les fresques étaient renommées *** et aussi car il y régnait une agréable fraicheur. Laetitia voulait voir la robe de la mariée et les toilettes des belles mères, aussi décidèrent-ils de rester jusqu’à la fin.

« Tiens c’est curieux, je comprends l’espagnol maintenant » chuchota Lætitia à l’oreille de Maurice : « évidemment, la lecture est en français, c’était une épitre de Saint Paul » lui répondit son compagnon. «  Cà me dit quelque chose, je me demande si je ne l’ai pas entendu au dernier mariage où je suis allée » poursuivit-elle. « Tu vas dans les églises, toi ! » la taquina Maurice. «  Pour les mariages uniquement ».  « Alors pas surprenant que tu aies déjà entendu ce texte c’est un must des mariages »lui assura-il « et d’ailleurs c’est justement dans le quatrième chapitre de mon livre ». « Ah bon ! C’est bizarre ». La lecture du livret de la célébration leur apprit que les jeunes mariés se nommaient Laetitia et Fernando, que c’était un mariage franco-espagnol et que le père Javier Ignacio (un père jésuite qui ressemblait à un tableau du Gréco) était « un ami de la famille ».

C’est dans son homélie assez colorée où il jonglait audacieusement du français à l’espagnol que Lætitia appris la signification de son prénom : La JOIE. Cette découverte et le fait que la mariée porte le même prénom qu’elle, l’émue finalement beaucoup et elle se mit à écouter avec attention toutes ces phrases auxquelles habituellement elle prêtait une écoute juste polie. « Je te reçois comme époux et je me donne à toi pour t’aimer fidèlement toute ma vie » c’était beau !

Elle se prit à imaginer qu’un jour quelqu’un puisse lui dire «  je me donne à toi pour la vie » C’était juste romantique…ou vraiment sérieux ? Ces deux-là pensaient-ils ce qu’ils disaient ? Autour d’elle, plusieurs de ses amies qui s’étaient mariées avaient déjà divorcé ou d’autres ne se mariaient tout simplement pas. Et elle ? Bah ! On verra bien, de toutes les manières, elle n’avait pas de «copain ».

Plus tard dans la soiré, ils déplièrent leur tente (1 seconde pour déplier et 5 minutes à deux pour réussir à replier le cerceau- mais ils progressaient), jusque une centaine de mètres sous le col, face à un panorama grandiose de terrasses accrochées à la pente, de petits villages miniatures, et dans le lointain, la côte et la mer en surbrillance. Ils pouvaient même apercevoir «  leur » presqu’ile !

Après un repas léger (ils s’étaient fait inviter au vin d’honneur, car ils étaient français, et il y avait des montagnes de tappas), Laetitia attaqua : « Alors, c’est dans ton bouquin ce qui a été lu au mariage cet après-midi, comment c’est possible ! »

«  Parce que c’est un texte hyper connu qui est un extrait d’une lettre de Saint Paul, il est très souvent choisi pour les mariages »

« Je ne comprends toujours pas pourquoi ton pape l’a mis dans son bouquin »

« Heu ! C’est une longue histoire, on en reparle demain à la sieste ok ? ». « Ok »

Ouf ! Il avait toute la nuit pour réfléchir et relire le chapitre IV, car il sentait qu’elle n’allait rien lui laisser passer.