Roman Chapitre VI suite et fin

Chapitre VI suite et fin

Lorsqu’ils émergèrent de leur torpeur, assez tard dans l’après-midi, une légère brise soufflait par les fenêtres qui s’ouvraient du côté de la gorge plongée maintenant dans l’ombre violette des sommets avoisinants. Finalement la descente leur parut très cool, il leur semblait que toute la nature, qui avait retenu sa respiration pendant les heures chaudes, se remettait à revivre grâce à ce petit vent du soir venu de l’océan.

Après le diner, ils avaient été invités à prendre « quelque chose » chez Asunción et Pedro. Maurice voulait les interroger sur leur longue vie. La simplicité des échanges et la gentillesse du vieux couple le poussa à oser sa question.

« Avez-vous traversé des crises dans votre vie ? »

Asunción et Pedro se regardèrent en souriant. Alors Asunción pris la parole :

« Évidement il y a eu des moments difficiles, ceux que nous avons réussi à nous générer tout seuls : des moments d’incompréhension, les moments où on ne va pas à la même vitesse, où on n’a plus trop le temps de se parler. Et il y a ceux qui viennent de l’extérieur : les enfants, la maladie, le boulot… »

Pedro repris « la naissance du premier garçon a été difficile pour moi, car sans s’en rendre compte Asunción lui donnait toute la place, j’avais l’impression de la perdre pour moi, elle était toujours fatiguée pour les câlins…On a mieux gérer le second et pourtant c’est à ce moment-là que je me suis retrouvé au chômage ». Puis les échangent tournèrent ensuite sur les choix de vie de leurs enfants, sur la famille, enfin ils se tournèrent vers nos amis et leur demandèrent : » Et vous, vous avez l’intention de vous marier ? »

Ce fut à leur tour de se regarder en souriant pour ne pas montrer leur embarras. Laetitia expliqua : « Nous sommes seulement amis, nous nous entendons bien, mais nous nous trouvons bien trop jeunes pour penser à nous  marier maintenant et…rien ne dit que nous nous marierons ensemble ! »

Asunción les encouragea à poursuivre leur amitié car elle leur permettrait de mieux se connaitre eux-mêmes et aussi de connaitre l’autre pour comprendre et apprécier les différences.

Après des adieux chaleureux, car Asunción et Pedro partaient très tôt pour le marché le lendemain matin, ils se retrouvèrent dans leur tente ou plutôt à moitié sous la toile et l’autre moitié dehors pour profiter de la fraicheur de la nuit et surtout pour «  voir les étoiles filantes » car c’était la nuit des Perséides.

Bien allongés dans leur sac à viande, côte à côte, ils ressentaient ce qu’on éprouve certainement tous devant ce spectacle fabuleux de la voie lactée et «  de la profondeur des espaces infinis intersidéraux et cosmiques » comme le dit Sam-Sam dans Pomme d’Api.

« Ça me fait penser à un truc qu’on a vu cette année en français, je ne sais plus si c’est de St Ex ou de Malraux, mais l’auteur qui comme nous regarde les étoiles se prend pour un plongeur, qui accroché à la sphère terrestre lancé dans l’univers, avance vertigineusement dans cet océan de planètes, d’étoiles et de mondes mystérieux ! » commença Laetitia

« Waouh, depuis quand les scientifiques sont aussi des poètes ! Tu m’as bluffé ! » L

la taquina Maurice. Elle allait répliquer mais il ajouta « mais ce que tu dis est très beau » et il enchaina « on a passé une super soirée encore une fois avec eux. Tu as vu comme ils sont accueillants et pas du tout «  vieux-jeu » et pourtant leurs deux garçons leur en ont fait voir. Ils ne les critiquent pas et cherchent à toujours trouver du « bon «  dans ce que les autres vivent. Et dans leur famille non plus ce n’est pas évident. Leur cousine qui élève seule son enfant et leur neveu qui est venu leur annoncer à eux d’abord qu’il avait certainement des tendances homo ! En plus, de leur temps, les «  filles-mères et les homos étaient bien souvent rejetés de leur famille ! »

Et il poursuivit «  Et bien c’est justement ça l’esprit du livre, l’attitude que nous recommande le pape François : Par exemple pour les parents qui se retrouvent seuls. Quelle que soit la cause, le parent qui habite avec l’enfant doit trouver soutien et réconfort auprès des autres familles qui forment la communauté chrétienne (252) ;

« Et que dit-il pour les homos » questionna Laetitia « car sur ce sujet il y a  eu pas mal de remous dans les médias »

« Il faut reconnaitre qu’il n’y a que deux paragraphes (250 et 251) qui traitent de cette question, le premier pour dire l’accueil de la personne : l’Eglise fait sienne l’attitude du Seigneur qui, dans son amour sans limite, s’est offert pour chaque personne sans exception…donc chaque personne doit être respectée dans sa dignité et accueilli avec respect .Et le suivant qui rappelle que l’Eglise ne peut cependant pas assimiler à  un mariage les unions homosexuelles.»

« Pas grand-chose en somme » conclut Laetitia. Et pourtant j’en connais un dans ma promo qui va quand même à la messe !

« Moi aussi, j’ai un ancien copain d’école qui était à l’aumônerie avec moi, un type super qui animait super bien les chants… »

«  Hé bien » qu’est-ce qu’il est devenu ?» demanda Laetitia ;

« Il bosse déjà dans l’audiovisuel, et il continue à jouer de la guitare en paroisse. Mais tout le monde n’a pas la chance d’être bien accueilli comme çà et parfois c’est déjà dans leur propre famille que c’est difficile, surtout au début »

« Remarque, c’est un peu normal car on n’a pas encore été beaucoup confronté à la situation. Moi, avant de rencontrer ce mec de ma promo et qu’on parle sérieusement de ce sujet, je n’y connaissais rien. Je n’étais ni pour ni contre, j’étais surtout complètement ignorante.»

« Ouais, moi c’était pareil. Heureusement que j’ai ce copain guitariste, sinon j’aurais sans doute rien compris. Et tu sais ce qu’il m’a dit : c’est qu’il y a des pays, en Afrique par exemple, où c’est la peine de mort si t’es homo. Ca fait froid dans le dos. On peut finalement presque s’estimer heureux de ce qu’il y a dans l’exhortation !

«  Tu l’as vu » s’exclama Laetitia. « Quoi ? » «  L’étoile filante, on est là pour ça non ! »

« Non, je l’ai raté ; on attend la prochaine et dodo » déclara Maurice

« Ok ! Je suis trop  bien comme ça à contempler les étoiles et à parler avec toi. Dis-moi il reste combien de chapitres »

«  Encore trois, le VII sur l’éducation des enfants, le chapitre VIII celui qui a été le plus critiqué et le chapitre IX, le dernier est très court et un peu trop spi pour toi je pense.  Ah ! Cette fois on l’a vu tous les deux, alors bonne nuit, dors bien »